Elisabeth Marie, conservatrice déléguée des antiquités et objets d’art (CDAO) du Conseil départemental de la Manche, et Robert Blaizeau, directeur du musée de Saint-Lô, réalisent actuellement un travail de recherche qui prolonge et complète le défrichage mené au Havre sur les logements dans la Reconstruction. Ils se plongent avec un plaisir évident dans ce moment de naissance du design et montent une impressionnante collection, tout en déployant la rigueur nécessaire à une sérieuse mise en mémoire, en relation avec les données du territoire. Cette mémoire est celle de la Normandie dans son paysage "moderne" et "reconstruit", celui des villes et villages détruits par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale. C'est un patrimoine longtemps resté invisible car il a été effacé par le "trauma" d'un événement violent et complexe, où l'invention de la société à venir (encore actuelle) jouxte un brutal effacement, où - plus terrible encore - celui qui vous détruit est aussi celui qui vous libère.
Pour comprendre ce moment déterminant dans notre histoire, nos chercheurs de la Manche se concentrent sur les objets quotidiens des habitats d'urgence et sur les logements de la Reconstruction : architecture, mobilier, ustensiles de cuisine et divers appareils domestiques... C'est un travail de médiation et de valorisation qui a débuté au début des années 2010 (Meubles de réinstallation 1944 // René Gabriel 2/2) dans un certain anonymat. Il attire désormais la télévision régionale qui vient d'y consacrer une série de reportages intitulé L'architecture de la reconstruction mal aimée en Normandie ? Tout ceci va aboutir sur un ouvrage qui fera date, La reconstruction dans la Manche (1944-1964) accompagné d'une exposition permanente dans le musée de Saint-Lô. En 2019.
Ci-dessous, pour mémoire, les "meubles de réinstallation" de René Gabriel (plans adoptés par le service des Constructions provisoires en avril 1944) très probablement photographiés lors de leur présentation dans la "pré-exposition de la Reconstruction" confiée en 1945 au Commissariat général du Salon des arts ménagers (cf AN-Pierrefitte fonds CNRS 20040397/1-20040397/4). On y découvre deux ensembles que connaissent tous les Normands, et plus généralement les habitants des régions françaises sinistrées par la guerre : la salle à manger avec le buffet-vaisselier V.150, la table T.151 et les chaises gigognes A.153, la chambre avec le lit n°155 et l'armoire S.154,
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